Atelier de recherche DAMUALCA, “Danses et musiques d’Amérique latine et des Caraïbes”
Mardi 7 juin, 10h-16h, université Paris 8, salle A0166
10h-12h
Prendre la rue. Ethnographie d’une performance des bandes à pied et des rara à Port-au-Prince
Mathilde Périvier, doctorante en anthropologie IMAF-EHESS & éditrice aux éditions de l’IHEAL
Les bandes à pied et les rara sont des troupes de musiciens liées aux périodes du carnaval et du Carême en Haïti, dont l’une des caractéristiques essentielles est de jouer tout en circulant dans l’espace. « Prendre la rue » est à chaque sortie un exercice renouvelé : le parcours emprunté par la bande change d’une semaine à l’autre, et en tant que performances, musicales ou physiques, ces sorties, même lorsqu’elles se répètent d’une semaine à l’autre, sont toujours différentes et à chaque fois uniques. En effet, chaque performance s’inscrit dans un tissu de relations sociales et d’identités qui lui préexiste, tissu lui-même transformé dans et par l’acte de la performance. Dans cette communication et suite à une longue enquête à Port-au-Prince (17 mois), je présenterai l’ethnographie d’une performance d’une bande à pied et montrerai comment grâce à la musique, une mémoire des lieux et du quartier est réactivée et devient acte de (re)connaissance du quartier, de ses lieux principaux et incontournables, de ses ancêtres visibles ou invisibles, de ses personnalités importantes. Ainsi, les personnes qui suivent la bande sortent de l’anomie, prennent place, se reconnaissent autant qu’elles sont reconnus dans un corps collectif territorialisé que la musique contribue à produire et à performer.
14h-16h
Tresser la danse et les relations féminines dans la fête de la Tirana (Nord Chili)
Laura Fléty, anthropologue, membre associée à Musidanse et Mondes Américains (UMR 8168, CNRS-EHESS)
Cette présentation explorera la nature des liens féminins qui se tissent à travers la danse et les pratiques socio-religieuses, au sein d’une confrérie de la ville d’Iquique, au nord du Chili. Les danseuses de cette confrérie, appelées les « Cuyacas » (« sœurs » en aymara), participent chaque année à la grande célébration de la Vierge du Carmen qui attire, en plein désert, des milliers de danseurs, musiciens et de pèlerins. Pendant neuf jours et nuits de fête, les confréries chantent et dansent inlassablement sur la grande esplanade du Temple de la Vierge. Je souhaite montrer la manière dont l’expérience dansée crée et mobilise différents registres relationnels et émotionnels au sein du groupe des Cuyacas : conflits et relations inter-familiales ; nostalgie et liens de filiation aux danseuses du passé ; relation intime avec la Vierge, figure centrale du catholicisme local incarnant un modèle de stabilité, de réciprocité et d’idéal maternel. Plus qu’une réflexion aboutie, il s’agira de revenir sur un travail ethnographique mené entre 2015 et 2017, et d’ouvrir quelques pistes de réflexion à la discussion collective.