Atelier AFRINUM “Technologie numérique, jeunesse et industries culturelles et créatives en Afrique de l’ouest”

TECHNOLOGIE NUMÉRIQUE, JEUNESSE ET INDUSTRIES CULTURELLES ET CRÉATIVES EN AFRIQUE DE L’OUEST

MUSÉE DE LA PHOTOGRAPHIE, SAINT-LOUIS (SÉNÉGAL)

14-15 DÉCEMBRE 2023

L’Atelier organisé par le programme ANR AFRINUM vise à questionner les rapports étroits, complexes et multiformes entre la musique populaire, la production vidéographique, la technologie numérique, et la jeunesse qui s’en est emparée, en sortant des sentiers battus. Pour ce faire, nous proposons de faire dialoguer des artistes dont les savoirs et les points de vue sont essentiels à la compréhension de leurs pratiques, des chercheurs qui travaillent sur ces questions avec de solides expériences de terrain, et des professionnels des industries culturelles et créatives (plateformes de streaming, sociétés de gestion des droits d’auteurs, opérateurs culturels, opérateurs téléphoniques, etc.). Ces échanges s’organiseront au sein de plusieurs panels, suivant deux axes majeurs de réflexion :

AXE 1 : PROFESSIONNALISATION ET MÉTIERS DU NUMÉRIQUE

Dans un continent secoué par des crises multiples, politiques, sécuritaires, économiques sociétales, et ayant une population très jeune en forte expansion (PNUD 2023 ; Atchadé 2018), la question de l’emploi des jeunes, qui était déjà à l’ordre du jour au lendemain des indépendances (Niang et al. 2016), constitue un enjeu crucial dont les termes sont de plus en plus repensés à l’aune des nouvelles opportunités qu’offrirait l’économie numérique conçue comme une plateforme à « haute intensité de main-d’œuvre » selon les termes de l’Organisation Internationale du Travail. De fait, la centralité des outils numériques (Kiyindou 2023) comme support de promotion pour les jeunes se donne à voir dans plusieurs secteurs de la vie économique, incluant la musique vue comme un sauf-conduit contre la pauvreté et la déconsidération sociale qui lui est associée, et partant comme une source potentielle d’émancipation sur le plan socioéconomique (Olusoji 2014). La musique en régime numérique peut dès lors mener à un déplacement des relations de « savoir- pouvoir » (Foucault 1977) des aînés vers les cadets sociaux dans des sociétés où les structures intergénérationnelles sont fortement codées et hiérarchisées.

Ce nouveau contexte numérique redistribue les cartes non seulement en termes de reconfiguration des lieux de création (grands studios analogiques remplacés par des home studios numériques) mais aussi d’émergence de nouveaux métiers, comme celui de beatmaker, d’ingénieur du son et d’arrangeur, fondés sur une maîtrise des outils numériques.

Au-delà, le développement du numérique se traduit par l’émergence d’un nouvel entrepreneuriat culturel incarné par de jeunes acteurs qualifiés qui s’organisent en collectifs de tailles variables pour maîtriser et rentabiliser l’essentiel de la chaîne de valeur qui s’étend de la production, à la distribution et à la diffusion de la musique. En un mot, dans ce panel, il s’agira de questionner la capacité du numérique à générer de nouveaux emplois, tout en se penchant sur les processus d’apprentissage, de transmission et de circulation de savoirs ainsi que les enjeux de pouvoir, et les contours des changements sociaux induits par ce nouvel écosystème

AXE 2 : LA POLITIQUE AUTREMENT : CHAMP ARTISTIQUE ET RESSOURCES NUMÉRIQUES

Le deuxième axe de l’atelier met l’accent sur les usages de la musique populaire comme instruments de participation citoyenne et politique. De par l’accessibilité croissante qu’il offre mais aussi sa capacité à échapper davantage à la censure, le numérique devient un outil largement utilisé par les artistes pour relayer des messages à caractère politique.

Les mouvements citoyens à contenus artistiques comme Y en a Marre (Sénégal), le Balai citoyen (Burkina Faso) ou Les Sofas de la République (Mali), principalement portés par des figures de proue tels que Keur Gui Crew, Smockey, Killa Ace ou Master Soumy, font tous usage, diversement, de la musique et du numérique pour amplifier la portée de leur message. Le JTR, initié et animé au Sénégal par Xuman et Keyti, constitue à cet égard un exemple de créativité fortement rendue populaire par le numérique. Parmi les questions posées dans ce panel, figurent : comment les artistes engagés dans de telles postures militantes négocient-ils parallèlement la rentabilité économique de leurs pratiques sujettes aux pressions politiques, voire à la censure ? Comprendre les trajectoires de ces artistes, le sens de leur engagement, le rapport que celui-ci entretient avec les usages créatifs des ressources numériques, sont autant de points de discussion qui pourront être abordés dans ce panel.

Programme AFRINUM St. Louis VF

Société française d'ethnomusicologie