Geerewol
Musique, danse et lien social chez les Peuls nomades wo∂aaße du Niger
Lignages wo∂aaße au Niger

Ces documents audio ont été enregistrés entre février 1997 et décembre 1998. Dans leur totalité, ils forment un corpus de 17 CD accessibles en ligne via la plateforme Telemeta du Centre de Recherche en Ethnomusicologie.




N.B. La qualité des enregistrements varie au gré des conditions du terrain : obligation d’enregistrer dans des salles à forte résonance ou trop petites, recours à des enregistreurs analogiques de moyenne qualité en raison de problèmes sécuritaires ou de pannes techniques, phénomènes d’écho dus à la chaleur sur quelques bandes, vent, cris, bousculades, etc.

Ligne de geerewol - dernière représentation de l'aube

Chanteur soliste de<em> ruumi</em>
Chanteur soliste de ruumi
Cercle de danse<em> ruumi</em>
Cercle de danse ruumi
Soliste modulant sa voix
Soliste modulant sa voix
Soliste de<em> ruumi</em> félicité
Soliste de ruumi félicité
Soliste contrôlant sa justesse
Soliste contrôlant sa justesse

1. Danse festive en cercle ruumi

La danse ruumi (<ruum- : « passer l’hivernage ») – alias ndoosa – peut être exécutée en toutes circonstances : durant les cérémonies lignagères de worso et inter-lignagères de da∂∂o ngaanyka, mais aussi en ville, sur la place des marchés ou lors des fêtes musulmanes de fin de Ramadan et de Tabaski. Elle rassemble dans un même cercle tous les jeunes hommes en présence, indifféremment de leur appartenance lignagère. Contrairement aux chants des représentations cérémonielles de yaake et de geerewol, les chants qui accompagnent la ruumi sont communs à l’ensemble des lignages wo∂aaße.

Chanteurs de ruumi - Partie chorale dansée

1.1. Danse circulaire ruumi, chant ruumi - 6'13
Cérémonie de worso des Gojanko’en Gawwanko’en, Azawak. Environ 30 chanteurs.
L’enregistrement de la partie chorale dansée a été réalisé, non pas du centre de la piste, mais au plus près du cercle de danse. Les chanteurs, qui tournent lentement dans le sens anti-horaire, passent donc successivement devant les micros, de sorte que l’on entend distinctement les variations de chacun (soditki).


1.2. Danse circulaire ruumi, chant ruumi - 6'43
Cérémonie de worso des Gojanko’en Gawwanko’en, Azawagh.
Environ 20 chanteurs.


1.3. Danse circulaire ruumi, chant ummale - 4'45
Cérémonie de worso des Gojanko’en Gawwanko’en, Azawagh.
Environ 30 chanteurs.


1.4 Danse circulaire ruumi, chant ruumi - 9'05
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou.
Environ 50 chanteurs.

Arrivées sur l'espace cérémoniel
Arrivées sur l'espace cérémoniel

Abris du lignage attaquant
Abris du lignage attaquant

Jeunes du lignage attaquant
Jeunes du lignage attaquant

Spectateurs à dos de chameaux
Spectateurs à dos de chameaux

Ligne de <em>geerewol
Ligne de geerewol

Les anciens face à la ligne de danse
Les anciens face à la ligne de danse

Spectateurs des lignages adverses
Spectateurs des lignages adverses

Spectatrices d'âge mûr
Spectatrices d'âge mûr

Jeunes
Jeunes spectatrices

Spectatrice en habit de lumière
Spectatrice en habit de lumière

<em>Geerewol</em> diurne du lignage attaquant
Geerewol diurne du lignage attaquant

<em>Geerewol</em> nocturne du lignage hôte
Geerewol nocturne du lignage hôte

Ligne de <em>geerewol</em>
Ligne de geerewol

Dernière danse avant dispersion
Dernière danse avant dispersion

Cendres de la <em>geerewol</em> nocturne
Cendres de la geerewol nocturne

L'arbre à bijoux - signe d'alliance
L'arbre à bijoux - signe d'alliance

Dispersion de la cérémonie
Dispersion de la cérémonie

2. Chants de lignage dooynorgol

Outre les chants communs à l’ensemble de la communauté, les quinze lignages wo∂aaße vivant au Niger possèdent chacun un chant, dit dooynorgol – ou encore jeldugol (littéralement. « chant de marque ») – par lequel ils s’identifient mutuellement et se différencient les uns des autres lors des rassemblements cérémoniels inter-lignagers da∂∂o ngaanyka.
Dans leur version intégrale tripartite (« grand chant », « petit chant » et chant de bara), ces hymnes lignagers ne peuvent être interprétés que lors de l’attaque rituelle inaugurant le lancement des cérémonies inter-lignagères de da∂∂o ngaanyka.
Dans leur version bipartite (« petit chant » et bara, ils sonnent l’appel à la danse geerewol, ou peuvent être entonnés à l’aube par un lignage attaquant souhaitant marquer sa présence ou défier son adversaire cérémoniel par le rappel de son identité musicale.

Représentation de <em>geerewol</em> - séquence chantée et dansée de<em> yaake</em>
Représentation de geerewol - séquence chantée et dansée de yaake

2.1. « Grand chant » (gimol manngol) des Gojanko’en - 1'27©
Interprété par Ouba Hassan. Niamey, enreg. hors circonstances, dans un hangar, à l’abri des oreilles et des regards.


2.2. Dooynorgol des Gojanko’en (version 1) - 17'44
Niamey, enreg. hors circonstances, dans un hangar, à l’abri des oreilles et des regards. Environ 10 chanteurs.
Lors de cette seconde prise, les chanteurs n’ont plus exécuté le « grand chant » (cf. piste 2.1).


2.3. Dooynorgol des Gojanko’en (version 2) - 8'29
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh, par la génération intermédiaire des makel’en (40-50 ans). Exécution dite daroroygol (« le chant que l’on exécute debout »), en guise d’appel à la danse geerewol. Environ 10 chanteurs.
Enregistrement pris en cours d’exécution.
À noter l’extrême lenteur de cette interprétation, qui témoigne d’une grande maîtrise. À la différence de la version précédente, la reprise facultative n’est ici jamais exécutée.


2.4. Dooynorgol des Kasawsawa (version 1) - 4'
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. Exécution au lever du jour, dite fajiriiwol (« chant de l’aurore »). Environ 15 chanteurs.


2.5. Dooynorgol des Kasawsawa (version 2) - 5'
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. Exécution au lever du jour, dite fajiriiwol (« chant de l’aurore »). Environ 10 chanteurs.


2.6. Dooynorgol des Jiijiiru - 5'22
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou, enreg. hors circonstances, à l’écart du regroupement cérémoniel.
Environ 15 chanteurs.
Pour comparaison, voir l’interprétation en solo de cette pièce, piste 3.13.
Après plusieurs jours de cérémonie, le soliste, qui a certainement beaucoup chanté, a la voix fortement cassée.


2.7. Dooynorgol des Njapto’en - 6'13
Niamey, enreg. hors circonstances, dans un hangar.
Environ 15 chanteurs.


2.8. Dooynorgol des Suudu Sukayel - 5'57
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou, enreg. hors circonstances, à l’écart du regroupement cérémoniel.
8 chanteurs. Seule version enregistrée.


2.9. Dooynorgol des Baagel’en - 5'25
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou, enreg. hors circonstances, à l’écart du regroupement cérémoniel.
7 chanteurs de la génération des hommes d’âge mûr (makel’en).
Seule version enregistrée.


2.10. Dooynorgol des ∫ii Nga’en - 9'26
Niamey, enreg. hors circonstances, dans un hangar (voir aussi segmentation par phrases, piste 2.20).
10 chanteurs. Seule version enregistrée.


2.11. Dooynorgol des Yaamanko’en - 7'12
Abalak (Azawagh), enreg. hors circonstances, dans une maison, à l’abri des oreilles et des regards. Environ 15 chanteurs.


2.12. Dooynorgol des ∫ii Korony’en (version 1) - 7'58
Niamey, enreg. hors circonstances, dans un hangar (voir aussi enregistrement d’archives, piste 2.19). 6 chanteurs.


2.13. Dooynorgol des ∫ii Korony’en (version 2) - 12'46
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. Exécution dite daroroygol (« le chant que l’on exécute debout »), en guise d’appel à la danse geerewol. Environ 15 chanteurs.
Le chœur « relayant » (jaßßitooße) est formé par des danseurs qui achèvent de se préparer à quelque distance de là. Le soliste (dooynoowo) et le meneur de chœur (jaßßitoowo) sont tous deux des hommes d’âge mûr (makel’en).


2.14. Dooynorgol des ∫ii Utey’en - 12'07
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou, enreg. hors circonstances, à l’écart du regroupement cérémoniel. Environ 10 chanteurs. Seule version enregistrée.


2.15. Dooynorgol des ∫ii Hamma’en - 7'58
Abalak (Azawagh), enreg. hors circonstances, aux lisières de la ville (voir aussi segmentation par phrases, piste 2.21). Environ 20 chanteurs, pour la plupart des hommes d’âge mûr (makel’en). Seule version enregistrée.


2.16. Dooynorgol des Degereeji Ayyanko’en et Nyiiwaaru (version 1) - 8'36
Tahoua (Ader), enreg. hors circonstances, à l’écart du marché. Environ 10 chanteurs, dont certains très hésitants.


2.17. Dooynorgol des Degereeji Kayawru (version 2) - 6'18
Niamey, enreg. hors circonstances, dans un hangar. 5 chanteurs.
Bien que les chanteurs nous aient présenté ce chant comme leur chant de lignage dooynorgol, il semble qu’ils n’en aient interprété ici qu’une seule partie, le bara, vraisemblablement faute de chanteur soliste.
À noter que cette interprétation du chant des Degereeji, quoiqu’elle repose sur le même système scalaire que la précédente (piste 16), se révèle sensiblement différente en termes de parcours mélodico-rythmiques. Il semblerait donc que les Degereeji, qui se subdivisent actuellement en six lignages secondaires susceptibles de s’opposer en cérémonies de da∂∂o ngaanyka, aient commencé à différencier leur chant de lignage.


2.18. Dooynorgol des ∫ißße Denke - 3'18
Tabotake (Damergou), enreg. hors circonstances, à l’écart du marché.
5 chanteurs. Seule version enregistrée, sur walkman.


2.19. Enregistrement d'archives - Extrait du dooynorgol des ∫ii Korony'en - 1'42
Enregistré par Henri Brandt en 1948, collection Gabus-Brandt 1953, Musée d'ethnographie de Neuchâtel, sous le titre « Chant des Bororo Bikorawa : deuxième chant de préparation ».
À noter la forte ressemblance de cet extrait avec la piste suivante (2.20), extraite de la 2è partie responsoriale du chant de dooynorgol des ∫ii Nga'en (enregistrement Loncke 1997).
Si Brandt n'a pas fait d'erreur sur l'identité du lignage enregistré en 1948, une telle ressemblance entre les deux chants serait la confirmation que le chant actuel des ∫ii Korony'en est le fruit d'une progressive différenciation, après que ces derniers aient fait scission d'avec leurs aînés ∫ii Nga'en.


2.20. Extrait du dooynorgol des ∫ii Nga'en - 1'23
Niamey, enreg. hors circonstances, dans un hangar (Loncke 1997).
Pour comparaison avec la piste précédente 2.19.


2.21. Extrait du « petit chant » des ∫ii Hamma'en – version collective - 2'15
Abalak (Azawagh), enreg. hors circonstances, aux lisières de la ville.
Ci-dessous la segmentation par phrases du petit chant dans sa version collective, pour comparaison avec la version soliste ci-après (piste 2.22).
Seuls les meneurs expérimentés maîtrisent suffisamment la structure de leur chant de lignage pour parvenir à en énoncer toutes les phrases en solo (partie soliste et chorale) sans avoir besoin d’un acolyte qui donne le répons.


2.22. Extrait du « petit chant » des ∫ii Hamma'en – version solo - 2'15
Par Nyale Yuguda, Abalak (Azawagh).
Ci-dessous la segmentation par phrases du petit chant dans sa version en solo, pour comparaison avec la version collective ci-dessus (piste 2.21).
Il semble que ce chanteur ait bien tenté de reproduire le déroulement conforme des parties de bara et du petit chant. Mais sa voix s’enraie… Il hésite sans cesse à poursuivre. Il sait qu’il est en train de se tromper.
Rares sont les solistes capables d’être autonomes sur la structure du « petit chant ». Car l’exécution de cette partie, éminemment collective, exige normalement la présence de deux meneurs qui se donnent le relais. Les chanteurs ne sont donc pas habitués à l’enchaîner seuls dans sa totalité.
Cette mise en partage du savoir musical, et plus généralement, l’absence chez les Wo∂aaße de toute forme de détention centralisée du savoir, constituent un facteur important de variabilité et d’évolution des chants lignagers.


Veillée de <em>da∂∂o ngaanyka</em>
Veillée de da∂∂o ngaanyka

Chants de maquillage
Chants de maquillage

Maquillage - <em>geerewol</em> de jour
Maquillage - geerewol de jour

Maquillage - <em>geerewol </em>de nuit
Maquillage - geerewol de nuit

Chant au campement
Chant au campement

Entre frères et cousins
Entre frères et cousins

Chant d'appel à la <em>geerewol</em>
Chant d'appel à la geerewol

Veillée de <em>da∂∂o ngaanyka</em>
Veillée de da∂∂o ngaanyka

Veillée familiale au campement
Veillée familiale au campement
Veillée de jeunes bergers
Veillée de jeunes bergers

Chant sous les abris cérémoniels
Chant sous les abris cérémoniels

Maquillage - <em>geerewol</em> de jour
Maquillage - geerewol de jour

Jeunes
Jeunes chanteurs

Chanteur d'âge mûr
Chanteur d'âge mûr

Porte-parole des jeunes
Porte-parole des jeunes

Jeunes sous le coup d'un sermon
Jeunes sous le coup d'un sermon

3. « Petits chants » et chants de bara

Interprétés en petites formations (veillées, cours d’amour, séances de maquillage et – pour les besoins de l’enquête – démonstrations solo), le chant de bara ou le « petit chant » (gimol pamarol) de chaque hymne lignager peuvent donner lieu à tout un jeu de variations individuelles, dénommées wasturuuji : « les phrases par lesquelles on se vante ».

Chanteurs du lignage attaquant sous leurs abris
Chanteurs du lignage attaquant sous leurs abris

3.1. Démonstration en solo du « petit chant » des Gojanko’en - partie antiphonale - 1'28
Par Ouba Hassan, Azawagh.
À l’arrière-plan, l’un des cousins de Ouba poursuit imperturbablement la partie de bara.


3.2. Démonstration en solo des phrases musicales (ßile) de wasturuuji bara des Gojanko’en - 4'15
Par 8 chanteurs, Azawagh.
Les premier (0’00), second (1’05) et quatrième chanteurs (1’44) font preuve d’une plus grande maîtrise, aussi bien du point de vue de la technique vocale (puissance, contrôle des hauteurs d’intonation, effets expressifs de timbre, de dynamiques d’intensité, tenue des valeurs longues) que de leur aisance à enchaîner une grande variété de phrases. Tous trois bénéficient d’ailleurs d’une certaine renommée.


3.3. Démonstration en solo des phrases musicales (ßile) de wasturuuji du « petit chant » et de wasturuuji bara des Gojanko’en - 2'10
Par Ouba Hassan, Azawagh.


3.4. Chant de wasturuuji bara des Gojanko’en - 3'09
Exécuté en contexte de veillée de cour da∂∂o lalwol, à l’orée du campement d’une jeune fille de même lignage, Azawagh. 6 chanteurs.
La nuit de cet enregistrement, les jeunes gens présents ont chanté durant plus de trois heures avant que trois jeunes filles, restées tapies dans l’ombre, osent finalement les rejoindre.


3.5. Chant de wasturuuji du « petit chant » des Gojanko’en - 5'11
Veillée autour de feux, cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. 7 chanteurs, dont 3 frères et 3 de leurs cousins.
Dans un esprit de relative cohésion, les chanteurs s’écoutent et même s’attendent, sans chercher à couvrir la voix d’autrui. Ils ménagent ainsi de nombreux effets de superpositions harmoniques sur des notes tenues, là où d’autres auraient opté pour le tuilage systématique, un jeu plus développé de variations et une surenchère vocale dans les aigus permettant d’émerger à titre personnel.


3.6. Chant de wasturuuji du « petit chant » et de wasturuuji bara des Gojanko’en - 7'36
Veillée autour de feux, cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. Une dizaine de chanteurs de la fraction des Gawwanko’en, maisonnées des Mbuuldi et des Kuskudu confondues.
Progressivement, le mode d’interaction des chanteurs prend une tournure plus agonistique : chacun met ici toutes ses ressources vocales en œuvre pour tenter d’émerger à titre individuel et de dominer l’espace sonore. À partir de 6’05, tous reviennent progressivement sur les wasturuuji du chant de bara.


3.7. Chant de dooynorgol (version 3) et de wasturuuji du « petit chant » des Gojanko’en - 5'07
Veillée autour de feux, cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. Une dizaine de chanteurs de la fraction des Gawwanko’en, maisonnées des Mbuuldi et des Kuskudu confondues.
Dans les wasturuuji bara, les chanteurs ne s’écoutent mutuellement que pour mieux tenter d’égarer l’autre par une surenchère de variations inattendues. Tandis que l’ensemble s’interrompt finalement d’un accord tacite, l’un des chanteurs tient à avoir le dernier mot (à partir de 5’37).


3.8. Démonstration en solo du dooynorgol (« petit chant » et bara) des ∫ii Hamma’en - 1'43
Par Nyale Yuguda, Abalak (Azawagh).
Une comparaison avec la version collective du même chant (cf. segmentation détaillée, pistes 2.21 et 2.22) indique que l’interprète ne respecte pas strictement l’ordonnancement des phrases, faute d’un répons et d’une connaissance suffisamment globale de la structure de la pièce. C’est d’ailleurs sans doute ce qui explique que le chanteur hésite à poursuivre, expliquant que sa voix s’enraie, comme s’il savait qu’il est en train de se tromper.


3.9. Démonstrations en solo du dooynorgol des Jiijiiru - 0'41
Chanteur resté anonyme, Abalak (Azawagh).
Selon l’interprète, cette partie correspond au chant de dooynorgol de son lignage (0’38 : « Ngol kam woni dooynorgol »). La comparaison avec d’autres versions du même chant enregistrées dans la région du Damergou (cf. pistes 2.6, 3.13 et 5.5) ne nous a cependant pas permis d’établir précisément de quelle partie il s’agit – « grand chant », « petit chant », ou variations personnalisées sous forme de wasturuuji.
La remarquable similitude de la seconde interprétation proposée peu après par le même chanteur (cf. piste suivante 3.10) – quoique prolongée de deux phrases supplémentaires – ne plaide pas en faveur d’une variation personnalisée.


3.10. Démonstrations en solo du dooynorgol des Jiijiiru – 2nde interprétation - 1'14
Chanteur resté anonyme, Abalak (Azawagh).


3.11. Démonstrations en solo du « petit chant » des Jiijiiru - 0'36
Chanteur resté anonyme, Abalak (Azawagh).
Selon l’interprète, cette partie correspondrait au « petit chant » (0’33 : « Kangol woni pamarol »), mais après comparaison avec d’autres versions du même chant (cf. notamment piste 3.13), il semblerait qu’il s’agisse plus exactement des phrases musicales de wasturuuji du « petit chant ». La 2nde interprétation de cette partie proposée par le même chanteur (cf. piste suivante 3.12) atteste en tout cas que l’on est bien dans une forme permettant une grande marge de variations personnalisées (cf. par exemple, la phrase de 0’17 à 0’27, reprise de façon variée en début de piste 3.12).


3.12. Démonstrations en solo du « petit chant » des Jiijiiru – 2nde interprétation - 0'44
Chanteur resté anonyme, Abalak (Azawagh).


3.13. « Petit chant » et wasturuuji du « petit chant » des Jiijiiru en solo - 7'37
Veillée autour de feux, cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou. Enregistrement impromptu.
L’interprète, un homme d’une quarantaine d’années, fait preuve d’une grande maîtrise vocale. Tout en préparant le thé, son compagnon tente de lui donner le contrepoint (2’07 à 2’36), mais manque bien vite d’inspiration… À l’arrière-plan, des danseurs exécutent le chant de la danse ruumi. À partir de 2’36, on peut également entendre les sonnailles des hommes qui s’apprêtent pour la danse geerewol.
Pour comparaison, voir l’interprétation collective de cette pièce, piste 2.6.


3.14. Chant de wasturuuji bara des Kasawsawa, dit moomorgol (« chant de maquillage ») - 2'02
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh.
3 chanteurs.
Du lever du jour au cœur de la nuit, les jeunes gens sont tenus de se consacrer à un certain nombre d’exécutions de leur chant de lignage dooynorgol sous ses différentes modalités, chacune portant une appellation spécifique en rapport avec le contexte ou le moment qui la caractérise. Lors des cérémonies de da∂∂o ngaanyka, le temps cérémoniel est avant tout un temps musical.

Mouvement de <em>yaake </em>
Mouvement de yaake
Gestuelle faciale de <em>yaake</em>
Gestuelle faciale de yaake
Roulement des iris
Roulement des iris
Parures de la<em> yaake</em>
Parures de la yaake
Danser sous le soleil au zénith
Danser sous le soleil au zénith

4. Représentations en ligne de yaake

La yaake est une représentation chorégraphique et chantée qui peut être exécutée en toutes circonstances festives ou cérémonielles, dès lors que plusieurs lignages wo∂aaße sont rassemblés. Elle met en scène sur une même ligne de danse tous les lignages en présence, chacun exécutant simultanément son propre chant lignager, ou plus exactement, sa partie de bara.
Au cours de la yaake, les jeunes danseurs se livrent à une gestuelle faciale très particulière, qui consiste à écarter les lèvres pour découvrir la blancheur de leurs dents et à écarquiller les yeux tout en faisant rouler leurs iris.

Représentation de <em>yaake </em>
Représentation de yaake

 

4.1. Représentation polymusicale de yaake - de près - 7'24
Fête de fin de Ramadan (juulde), Niamey.
Entre 60 et 80 chanteurs.
Lors des représentations de yaake, tous les lignages en présence exécutent simultanément leurs chants de bara respectifs, réalisant ainsi ce qu’on appelle une « polymusique ».
L’enregistrement a été réalisé en longeant très lentement la ligne de danse du sud au nord (avec toutefois un retour momentané en arrière, sur le lignage des ∫ii Nga’en). Aussi entend-on distinctement les passages d’un chant lignager à l’autre, tout en conservant en arrière-plan sonore la dimension polymusicale formée par l’ensemble.


4.2. Représentation polymusicale de yaake - de loin - 4'35
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. Une centaine de chanteurs. Enregistrement statique, à une centaine de mètres de distance.
Lorsque les représentations de yaake réunissent plus de deux ou trois lignages, les différents chants lignagers qui s’y trouvent juxtaposés finissent par ne plus être identifiables. D’un point de vue global, l’ensemble polymusical prend alors la forme d’une sorte de « multivocalité amorphe », à la fois privée de la consistance de ses sous-ensembles et sans contour général. C’est l’étrange paradoxe de ces chants wo∂aaße qui, quel que soit leur niveau d’affirmation identitaire, ne se laissent jamais appréhender comme un tout univoque.

Gestuelle faciale de <em>yaake</em>
Gestuelle faciale de yaake
Ligne de la dernière <em>geerewol</em>
Ligne de la dernière geerewol
Ondulement
Ondulement
Face au couchant
Face au couchant
La ola des corps et des bras
La ola des corps et des bras
À chacun son chant
À chacun son chant
Épreuve d'endurance
Épreuve d'endurance
De nuit face au feu
De nuit face au feu

5. Représentations en ligne de geerewol

Les représentations de geerewol constituent le rituel central des cérémonies inter-lignagères de da∂∂o ngaanyka. La geerewol n’est d’ailleurs pas censée être exécutée en d’autres circonstances.
Toute représentation de geerewol repose sur l’alternance de deux séquences :

  • une séquence chorégraphique et chantée de yaake, où les jeunes gens exécutent leur hymne lignager – bara ou « petit chant » – tout en réalisant la gestuelle caractéristique de la danse yaake.
  • une séquence chorégraphique dite geerewol, qui repose sur le rythme des sonnailles que les danseurs portent au pied.

La règle veut que les deux lignages à l’initiative de la cérémonie dansent à tour de rôle : les visiteurs, de jour, et les hôtes, de nuit. Chaque partie peut néanmoins partager sa ligne de danse avec des lignages alliés : comme dans les représentations de yaake, le résultat vocal relève alors de la polymusique. À l’issue de chaque représentation, des jeunes femmes du lignage adverse sont désignées pour venir élire le « plus beau » danseur.



  • 5a. Séquence chorégraphique et chantée de yaake

Représentation de <em>geerewol </em>- séquence de <em>yaake</em>
Représentation de geerewol - séquence de yaake

5.1. Chant de bara des Gojanko’en - 5'32
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. Environ 25 chanteurs.
L’enregistrement a été réalisé en longeant la file de danse, de sorte que les phrases musicales exécutées par chacun des chanteurs soient nettement audibles. On entend à 2’26 les responsables de la Jeunesse encourager les chanteurs : « Entonnez (le chant de bara) plus fort ! » (Ÿeftee bara dow !)


5.2. Ensemble polymusical formé par le chant de bara des Gojanko’en et des Kasawsawa - 5'11
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh. Environ 30 chanteurs.
L’enregistrement a été réalisé en longeant la file de danse du sud au nord, de sorte que les phrases musicales exécutées par chacun des chanteurs soient nettement audibles.


5.3. Chants de bara des Suudu Sukayel - 1'51
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou. Environ 20 chanteurs.
Enregistrement statique, face au milieu de la chaîne de danse.


5.4. Ensemble polymusical formé par le chant de bara des ∫ii Korony’en et des Yaamanko’en - 3'12
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh.
Environ 40 chanteurs.
Enregistrement statique, face au milieu de la chaîne de danse.
Afin de mieux capter l’attention du public et de submerger leurs alliés ∫ii Korony’en, les Yaamanko’en s’unissent momentanément dans l’exécution de leur « petit chant ».


5.5. Ensemble polymusical formé par le chant de bara des Gojanko’en, des Jiijiiru et des Kasawsawa - 4'42
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou.
Environ 50 chanteurs.
Enregistrement statique face aux Jiijiiru, qui dominent nettement sur le plan sonore.
Afin de mieux capter l’attention du public et de submerger leurs alliés Gojanko’en et Kasawsawa, les Jiijiiru s’unissent momentanément dans l’exécution de leur « petit chant ».


De nuit face au feu
De nuit face au feu
De jour face au couchant
De jour face au couchant
Mouvement synchrone
Mouvement synchrone
Pose de sonnailles en métal
Pose de sonnailles en métal
Hachettes de <em>geerewol</em>
Hachettes de geerewol
  • 5b. Séquence chorégraphique de geerewol

Représentation de<em> geerewol</em> - séquence de <em>geerewol</em>
Représentation de geerewol - séquence de geerewol

5.6. Jeu de sonnailles des ∫ii Korony’en - 1'46
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Girmaawa, Azawagh.
Environ 20 danseurs.
Enregistrement statique, face à la chaîne de danse.


5.7. Fin du mouvement de yaake et jeu de sonnailles des Suudu Sukayel - 2'46
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou.
Environ 30 danseurs.
Enregistrement statique, face à la chaîne de danse.
Tandis que les responsables de la Jeunesse (jaaji’en) félicitent les meilleurs danseurs et veillent à la bonne synchronisation de l’ensemble à coups d’interpellations, les vieilles femmes marquent leur approbation en lançant des “huu huuuuu” suraigus et clament à la cantonade louanges et railleries.


Pose du toupet avant élection
Pose du toupet avant élection
Seules face à la ligne de danse
Seules face à la ligne de danse
Choisir "le plus beau"
Choisir "le plus beau"
Sous le regard du public
Sous le regard du public
Climax avant élection
Climax avant élection
"Semblables à des génies"
"Semblables à des génies"
  • 5c. Séquence de yaake pendant le rite d’élection

Électrices de <em>geerewol</em> entrant sur l'esplanade de danse
Électrices de geerewol entrant sur l'esplanade de danse

5.8. Chant de bara des Jiijiiru avant élection - 1'05
Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou.
Environ 30 danseurs, chantant sporadiquement. Enregistrement statique, face à la chaîne de danse.
À la grâce ondulatoire et aérienne des précédentes séquences de yaake fait place une précipitation frénétique, quand vient le moment de l’élection. Le chant se réduit alors à quelques notes entrecoupées de vibrations des lèvres, de halètements et de clics qui, aux dires de certains Wo∂aaße, évoquent les manifestations sonores de la grue couronnée lors de ses parades nuptiales.


5.9. Chant de bara des Suudu Sukayel - Élection -
« Chant de grâce » - 2'41

Cérémonie de da∂∂o ngaanyka, puits de Farak, Damergou.
Environ 30 danseurs, chantant sporadiquement. Enregistrement statique, face à la chaîne de danse.


Électrice d'une <em>geerewol</em> nocturne
Électrice d'une geerewol nocturne



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